Contamination par des nitrosamines
Stratégie de la Pharmacopée Européenne
Nouvelle stratégie relative aux impuretés N-nitrosamine dans les monographies de la Ph. Eur.
Lors de sa 177e session (novembre 2023), la Commission européenne de Pharmacopée (EPC) a approuvé la stratégie relative aux impuretés N-nitrosamine dans les monographies spécifiques.
Adoption par la Commission européenne de Pharmacopée des monographies générales 2034 et 2619 révisées avec un nouveau paragraphe sur le contrôle des N-nitrosamines
Au cours de sa 174e session, en novembre 2022, la Commission européenne de Pharmacopée a adopté les monographies générales révisées Substances pour usage pharmaceutique (2034) et Préparations pharmaceutiques (2619), dans lesquelles figure désormais un paragraphe expliquant l’approche de la Pharmacopée Européenne (Ph. Eur.) concernant les impuretés N-nitrosamines.
Mise en application rapide des monographies révisées de sartans le 1er avril 2021
En février 2021, la Commission européenne de Pharmacopée a publié, par le biais de sa procédure de révision rapide, cinq monographies révisées portant sur les sartans à cycle tétrazole (Valsartan, Losartan potassique, Irbésartan, Candésartan cilexétil et Olmésartan médoxomil). Afin de maintenir les exigences de la Pharmacopée Européenne (Ph. Eur.) en phase avec les dernières décisions réglementaires de l’EMA[1], la section « Production » des monographies révisées a été reformulée et la section portant sur l’essai des N-nitrosamines a été supprimée. Pour de plus amples informations, consultez le communiqué de presse.
Révision des monographies de la Ph. Eur. concernées pour introduire des limites de teneur en N-nitrosamines
Le 2 avril 2019, la Commission européenne a adopté une décision juridiquement contraignante concernant la présence d’impuretés nitrosamines dans les médicaments contenant les cinq substances actives initialement concernées (valsartan, candésartan, irbésartan, losartan et olmésartan). En réponse, la Commission européenne de Pharmacopée a décidé de réviser les monographies correspondantes de la Ph. Eur. : Valsartan, Losartan potassique, Irbésartan, Candésartan cilexétil et Olmésartan médoxomil.
Ces cinq monographies révisées, publiées en juin 2019 dans la 10e édition de la Ph. Eur. pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2020, comprennent des limites de teneur en NDMA et NDEA conformes aux limites provisoires prescrites à l’Annexe 1 de la Décision d’exécution de la Commission européenne. Ces limites provisoires étaient applicables pendant une période de transition de 2 ans, au cours de laquelle étaient interdits sur le marché tous les lots contenant soit l’une des deux impuretés (NDMA et NDEA) à teneur supérieure à ces limites, soit les deux impuretés ensemble quelle qu’en soit la teneur (quantifiable).
Le 13 novembre 2020, l’EMA a publié un communiqué[1] indiquant que son comité des médicaments à usage humain (CHMP) avait aligné les recommandations visant à limiter les impuretés nitrosamines dans les sartans sur les recommandations qu’il avait émises pour d’autres classes de médicaments. Le principal changement concernait les limites applicables aux nitrosamines : alors qu’elles s’appliquaient auparavant aux substances actives, elles s’appliqueraient dès lors aux médicaments. La Ph. Eur. a donc adapté sa stratégie et a révisé à nouveau les monographies des cinq substances actives initialement concernées (valsartan, candesartan, irbésartan, losartan et olmésartan) pour supprimer les passages de la section « Essais » et reformuler la section « Production ». Ces 5 monographies révisées ont été publiées dans le Supplément 10.6 de la Ph. Eur. (juillet 2021).
1. Agence européenne des médicaments, « Nitrosamines : EMA aligns recommendations for sartans with those for other medicines », 13 novembre 2020.
Emplacement pour le communiqué qui sera publié à la suite de l’adoption, lors de la session de novembre de la COM, de la révision de 2034 & 2619.
Élaborer un chapitre général de la Ph. Eur. décrivant des procédures analytiques pour le contrôle des N-nitrosamines en cause
Lors de sa 168e session, en novembre 2020, la Commission européenne de Pharmacopée a adopté un nouveau chapitre général sur l’analyse des impuretés N-nitrosamines dans les substances actives (chapitre 2.5.42, précédemment numéroté 2.4.36).
Sorte de boîte à outils analytique, ce chapitre propose trois procédures faisant appel à des instruments plus ou moins sophistiqués (CPG-SM, CL-SM/SM et CPG-SM/SM). Il a paru important de décrire plusieurs procédures s’appuyant sur des instruments différents, afin de tenir compte de la diversité des besoins des laboratoires de contrôle qualité, en Europe et au-delà.
Étalons de référence de la Ph. Eur.
À l’appui de la mise en œuvre du chapitre général de la Ph. Eur. récemment adopté sur l’analyse des impuretés N-nitrosamines dans les substances actives (2.5.42., précédemment numéroté 2.4.36.), sept étalons de référence ont été établis (N-nitroso-dibutylamine, N-nitroso-diéthylamine, N-nitroso-diisopropylamine, N-nitroso-diméthylamine, N-nitroso-dipropylamine, N-nitroso-éthyl-isopropylamine et acide N-nitroso-N-méthyl-4-aminobutyrique). Ils sont disponibles auprès de l’EDQM.
Procédure CEP
En 2018, l’EDQM a été informée de la présence de NDMA (une impureté nitrosamine) dans du valsartan provenant d’une source spécifique. Depuis, plusieurs actions ont été menées pour réduire le risque de présence d’impuretés nitrosamines dans les substances actives couvertes par les certificats de conformité aux monographies de la Pharmacopée Européenne (CEP). Un récapitulatif de ces actions est présenté ci-dessous.
Tous les dossiers CEP pour des sartans à cycle tétrazole ont été mis à jour de sorte à évaluer la présence potentielle de nitrosamines conformément aux dernières décisions prises au niveau de l’UE, qui ont été intégrées dans les monographies correspondantes de la Pharmacopée Européenne (Ph. Eur.).
En septembre 2019, l’EMA a diligenté une procédure en application de l’Article 5(3) du règlement (CE) nº 726/2004, dans l’objectif de fournir aux titulaires d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des indications sur les moyens d’éviter la présence d’impuretés nitrosamines dans les médicaments à usage humain (voir la page de l’EMA relative aux impuretés nitrosamines). L’EDQM a invité les titulaires de CEP à suivre une procédure de réévaluation similaire, ce qui a déclenché une large revue des demandes de CEP concernées.
Statut actuel de la procédure de réévaluation
La procédure de réévaluation en trois étapes suit son cours. Les étapes 1 et 2 sont achevées, et la date limite pour l’étape 3 est fixée au 1er octobre 2023 (voir « Nitrosamines – Report au 1er octobre 2023 de la date limite de réalisation de l’“Étape 3 – Révision du CEP” pour tous les détenteurs de CEP ». La procédure complète est détaillée ci-après.
- Étape 1 : les titulaires de CEP ont procédé à l’évaluation du risque posé par les nitrosamines pour leur substance.
- Étape 2 : lorsqu’un risque a été identifié, les titulaires de CEP ont communiqué à l’EDQM les résultats des analyses de confirmation attendues. Lorsqu’aucun risque n’a été identifié par les titulaires de CEP, ces derniers n’ont pas eu à informer l’EDQM, ni à effectuer une révision de leur dossier, sauf si jugé nécessaire sur la base d’autres éléments.
- Étape 3 : pour les dossiers CEP dans lesquels un risque de contamination par les nitrosamines a été identifié, les titulaires doivent, avant le 1er octobre 2023, évaluer les demandes de révision afin de modifier le procédé de fabrication et/ou d’introduire des contrôles (p. ex. limites de spécifications), le cas échéant.
Qu’en-est-il des dossiers déjà réévalués ?
Quelle que soit la substance, tous les CEP nouveaux ou renouvelés accordés depuis début 2019 comprennent une évaluation du risque de formation de nitrosamines ou de contamination par des nitrosamines (pour en savoir plus sur le contenu de l’évaluation des risques, voir ci-dessous). Cela s’applique également à toute révision impliquant une introduction ou une modification éventuelle d’un risque lié aux nitrosamines (p. ex. modification de la voie de synthèse ou de l’approvisionnement en matières).
Par ailleurs, l’EDQM a réévalué la majorité des demandes faisant état d’un risque de présence de nitrosamines. Dans le cas où des limites sont mentionnées dans les CEP, elles reposent sur les doses admissibles de nitrosamines publiées par l’EMA dans leur document « Questions/réponses destinées aux détenteurs/demandeurs d’AMM relatives à l’avis du CHMP, en vertu de l’article 5(3) du règlement (CE) nº 726/2004, sur les impuretés nitrosamines dans les médicaments à usage humain » (en anglais uniquement).
Si aucune limite n’est mentionnée pour les nitrosamines dans un CEP, cela signifie qu’aucun risque n’a été identifié ou, si un risque a été identifié, que ces impuretés sont absentes dans la substance active et que des contrôles appropriés ont été introduits pour s’assurer de leur absence conformément aux principes énoncés dans le guideline ICH M7
Évaluation du risque lié aux nitrosamines : dates limites de soumission et informations à inclure
Toute nouvelle demande (concernant la pureté chimique ou les drogues végétales), les dossiers frères, les demandes de renouvellement ou de révision avec introduction ou modification potentielle du risque lié aux nitrosamines doivent inclure un résumé de l’évaluation du risque de présence de nitrosamines reposant sur les principes énoncés dans les guidelines ICH Q9 et ICH M7. L’évaluation doit porter non seulement sur les risques liés au procédé de fabrication, mais également sur ceux liés à l’introduction de matières dans la fabrication (matières de départ, réactifs, solvants — frais et récupérés, p. ex.) ainsi qu’à la dégradation.
Si un risque de présence de nitrosamines est identifié à l’issue de l’évaluation, il convient d’effectuer des analyses de confirmation à l’aide de méthodes sensibles et dûment validées et d’inclure les résultats obtenus dans la demande de CEP.
Si des impuretés nitrosamines sont détectées, les titulaires de CEP doivent prendre les mesures adéquates pour limiter le risque (p. ex. des contrôles supplémentaires ou une modification du procédé de fabrication), et normalement une limite doit être incluse dans la spécification de la substance active.
Les titulaires de CEP ont aussi la possibilité d’ajouter l’évaluation des risques à leur dossier CEP en passant par une révision mineure.
De plus amples informations sur la soumission de l’évaluation du risque d’impuretés nitrosamine dans le cadre de la procédure de réévaluation sont disponibles sur le site web de l’EDQM.
Point sur la collaboration internationale
Sur cette question, l’EDQM coopère continuellement avec les autorités réglementaires à l’échelle nationale, européenne et internationale, notamment par le biais du « Nitrosamines International Strategic Group » (NISG), et continuera à le faire pour assurer une approche coordonnée et harmonisée de la prise de décisions et de leur mise en œuvre.
Inspections BPF et risque lié aux nitrosamines
Ces dernières années, l’EDQM a également joué un rôle actif dans les programmes d’inspection des fabricants de substances actives, notamment par la réinspection de certains sites de production impliqués dans la fabrication de substances actives de type sartan, afin de confirmer la mise en œuvre de mesures appropriées en matière de fabrication et de BPF.
Au cours d’une inspection, les inspecteurs vérifient systématiquement si l’entreprise a réalisé une évaluation appropriée des risques liés aux impuretés nitrosamines.
Les nitrosamines en quelques dates
- Juillet 2018 : enquête sur les impuretés nitrosamines dans le valsartan
- Septembre 2018 : enquête étendue aux sartans à cycle tétrazole
- Février 2019 : publication du rapport de saisine du CHMP au titre de l’article 31 de la directive 2001/83/CE : les entreprises doivent réévaluer leurs procédés de fabrication afin d’éviter la présence d’impuretés nitrosamines dans les sartans à cycle tétrazole utilisés dans des médicaments à usage humain
- Septembre 2019 : l’EMA diligente une investigation au titre de l’article 5(3) du règlement (CE) nº 726/2004 de l’UE pour les médicaments à usage humain contenant des substances actives fabriquées par synthèse chimique
- Octobre 2019 : l’EDQM invite les titulaires de CEP à suivre une procédure de réévaluation (par étapes) concernant la présence de nitrosamines dans leurs substances actives. Pour en savoir plus sur cette procédure : « Évaluation du risque associé aux nitrosamines : mise à jour pour les titulaires de CEP » et « Nitrosamines : le point sur la procédure CEP »
- Mars 2020 : la date limite de l’étape 1 (identification des risques) de la procédure de réévaluation lancée par l’EDQM est reportée au 31 juillet 2020
- Juillet 2020 : le champ d’application est élargi (par l’EMA et l’EDQM) afin d’inclure tous les médicaments chimiques et biologiques
- Juillet 2022 : la date limite de l’étape 3 (dépôt d’une demande de CEP révisée à l’issue de l’évaluation des risques) de la procédure de réévaluation est reportée au 1er octobre 2023
- Septembre 2022 : date limite de l’étape 2 (envoi des résultats des analyses de confirmation lorsqu’un risque de présence de nitrosamines a été identifié)
- Juillet 2023 : nouvelles approches scientifiques pour la catégorisation des N-nitrosamines et pour l'établissement de doses acceptables (DA)
- Octobre 2023 : date limite du dépôt d’une demande de CEP révisée si un risque a été identifié
Développement de stratégies d’échantillonnage et de méthodes d’analyse avec les OMCL
Coordination des campagnes d’échantillonnage et d’analyse
La coordination des campagnes d’échantillonnage et d’analyse assure le développement de procédures analytiques pour le dosage des nitrosamines et leur mise à disposition des parties intéressées. L’EDQM a aussi participé aux efforts de coordination des travaux de développement de procédures analytiques permettant le contrôle des nitrosamines, ainsi que d’un programme d’échantillonnage et de contrôle d’urgence conduit selon une approche d’analyse du risque. Tous les laboratoires membres du réseau OMCL qui disposaient des équipements nécessaires ont ainsi pu contribuer à la réalisation de contrôles efficients et ciblés sur des médicaments contenant des sartans. Ces travaux ont été cruciaux pour fournir aux autorités réglementaires un support technique solide et efficace.
Le contrôle des nitrosamines pose de nombreux défis, notamment la nécessité de développer des méthodes de détection de haute sensibilité, de couvrir un large spectre de N-nitrosamines et de contrôler différents types de substances actives. Le réseau OMCL a néanmoins développé des méthodes de dosage de la NDMA reposant sur trois principes analytiques différents, ainsi que des méthodes spécifiques pour la NDEA. L’OMCL allemand CVUA Karlsruhe a également publié la première méthode permettant le dosage simultané de la NDMA et de la NDEA dans des comprimés de sartans, et l’OMCL bavarois a mis au point une méthode spécifique, publiée sur le site de l’EDQM, de dosage de l’acide N-nitroso-N-méthyl-4-aminobutyrique (NMBA) résultant de l’utilisation de N-méthylpyrrolidone. Les méthodes publiées ont été progressivement perfectionnées afin de couvrir un spectre plus large de molécules et/ou de nitrosamines, et d’autres substances génotoxiques (de type azidométhyle, par exemple). Une liste de toutes les méthodes d’accès public développées par le réseau des OMCL et par des organisations partenaires est disponible sur le site web de l’EDQM : Projets ad hoc du réseau OMCL.
Le réseau OMCL, sous la coordination de l’EDQM, a aussi développé :
- un format commun pour l’échange de plans d’échantillonnage et de résultats d’analyse entre laboratoires participants,
- un plan d’échantillonnage, reposant sur la notion de risque, établi en discussion avec l’EMA, les Autorités nationales compétentes (ANC), les corps d’inspecteurs et des représentants du CMDh (coordination de l’UE pour la reconnaissance mutuelle et les procédures décentralisées d’autorisation des produits à usage humain), et actualisé en continu.
L’objectif de ces activités de contrôle est de mesurer les niveaux de contamination des produits concernés, d’assurer une surveillance du marché pour des produits similaires et des produits à risque théorique faible, et d’analyser des échantillons provenant d’inspections BPF.
Les méthodes analytiques du réseau OMCL/EDQM sont également utilisées :
- pour l’analyse de substances actives, autres que des sartans, qui proviennent de sites de production « suspects »,
- comme point de départ pour le développement de méthodes générales de la Ph. Eur.
Des méthodes d’analyse ont aussi été développées par les OMCL pour d’autres N-nitrosamines telles que la NDIPA (N-nitroso-diisopropylamine), la NEIPA (N-nitroso-éthyl-isopropylamine), la NDBA (N-nitrosodibutylamine) et le NMBA (acide N-nitroso-N-méthyl-4-aminobutyrique, résultant de l’utilisation de N-méthylpyrrolidone).
Ces travaux se poursuivent avec de nouveaux types de contaminants N-nitrosamine signalés au cours de la procédure de réévaluation (décrite ci-dessus).
Rapport annuel 2023 de l’EDQM : un nouveau format pour valoriser une année de changements
Nouvelle stratégie relative aux impuretés N-nitrosamine dans les monographies de la Ph. Eur.
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